Et puisque je vogue vers la haute mer
Et puisque je vogue vers la haute mer et que le vent gonfle mes voiles,
Je vous dis qu’il n’est rien, dans l’univers entier qui soit stable ;
Tout fluctue, toute image qui se forme est changeante.
Le temps même s’écoule d’un mouvement continu,
Tout à fait comme un fleuve ; en effet ni le fleuve ni l’heure légère
Ne peuvent s’arrêter, mais de même que l’onde est poussée par l’onde
Et que celle qui arrive est poursuivie par la suivante et poursuit la précédente
Ainsi s’enfuient les instants qui semblablement se suivent
Et se renouvèlent toujours ; car ce qui fut auparavant n’existe plus,
Ce qui n’était pas se produit et chaque minute laisse place à une autre.
Et, quoniam magno feror aequore plenaque uentis
uela dedi nihil est toto, quod perstet, in orbe.
Cuncta fluunt omnisque uagans formatur imago.
Ipsa quoque adsiduo labuntur tempora motu,
uela dedi nihil est toto, quod perstet, in orbe.
Cuncta fluunt omnisque uagans formatur imago.
Ipsa quoque adsiduo labuntur tempora motu,
non secus ac flumen ; neque enim consistere flumen
nec leuis hora potest ; sed ut unda impellitur unda
urgeturque prior ueniente urgetque priorem,
tempora sic fugiunt pariter pariterque sequuntur
et noua sunt semper ; nam quod fuit ante, relictum est
nec leuis hora potest ; sed ut unda impellitur unda
urgeturque prior ueniente urgetque priorem,
tempora sic fugiunt pariter pariterque sequuntur
et noua sunt semper ; nam quod fuit ante, relictum est
itque quod haud fuerat, momentaque cuncta nouantur.
Ovide, Les Métamorphoses, Livre XV, 176-185 Traduction Danièle Robert, Actes Sud 2001
Illustration : Tiepolo, Apollon et Daphné (1743-44). Musée du Louvre