Immeubles
Dans de grands escaliers obliques
les regards longent
les salissures éternelles
du hasard abâtardi,
ils ne veulent pas
des chambres,
des refuges tristes
où habite comme une mort.
Ils espèrent
un peu moins de solitude,
plus de rires,
que sais-je, l'amour probablement—
Et un jour tout s'ordonnera.
Leurs doigts effleurent
la craie douceâtre des murs,
les griffures, les traces :
"Nous appartenons
à ce désespoir,
à ce palimpseste
de foule désordonnée ;
la rage et les larmes, les élans,
d'un coup reparaîtront
et dans les immeubles le silence
sera moins lourd ?"
Personne ne le sait,
celui qui passe, lui non plus,
n'est personne, il se tait,
cela lui pèse, il poursuit
son incroyable questionnement.
Roger Dextre, La terre n'est à personne, Editions Seghers 1985, repris dans Œuvres poétiques tome 1, La rumeur libre éditions 2012