L’herbe au-delà des herbes
Mon cœur n’a plus pleuré depuis si longtemps,
pour personne,
pour rien.
Il s’est tu,
immobile et meurtri,
il a noyé tout son vécu,
il s’est endurci en lui-même,
comme une graine étrangère, sauvage.
Mais l’heure de germer lui viendra –
il va pousser près de quelque chemin,
dans un pré humide.
Ce sera de l’herbe au-delà des herbes :
personne ne la verra,
personne ne l’entendra,
personne ne la sentira au toucher –
mais près d’elle on languira
sans raison,
sans consolation.
Viktor Kordun (1946-2005) dans Clarinettes solaires, Anthologie de la poésie ukrainienne pp 80-81 Textes choisis, présentés et traduits par Dmytro Tchystiak. Christophe Chomand Editeur 2013
Merci à Marie-Pierre Barrière pour cette découverte
Image : Arkhip Kouïndji, Après la pluie (1879), peintre ukrainien de la lumière né à Marioupol