Ni renard, ni croûton, ni patates
Il n'est pas là le vieux soleil,
Aussi absent que quand on dort.
Le champ a froid. Les feuilles sont sèches.
Mal est ultime en cette lumière.
Dans cet air morne les tiges brisées
Ont des bras sans mains. Ont des troncs
Sans jambes ou, pour cela, sans têtes.
Ont des têtes où un cri captif
Ont des têtes où un cri captif
Est le simple mouvement d'une langue.
La neige pétille comme une vision tombant
Du ciel, comme la vision de claires disparitions.
Les feuilles sautillent, griffent le sol.
C'est grand janvier. Le ciel est rude.
Les tiges dans la glace ont leurs fermes racines.
Là, dans cette solitude, une syllabe,
Hors de ces gauches palpitations,
Entonne son vide singulier,
Le rien le plus féroce des bruits d'hiver.
Là, dans ce mal, nous connaissons
Le bien dans la suprême pureté.
Le corbeau rouillé prend son vol
Son œil brille de méchanceté....
On vient le voir ici pour se distraire,
mais à distance, sur un autre arbre.
Wallace Stevens, Transport vers l'été. Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Alexandre Prieux. Editions Nous 2020.