Petits Motets d'Amour (extrait)

Publié le par Fred Pougeard

Il y a sous la lune
les belles dunes.
Il y a dans les bois
l'oiseau de proie.
 
Ton sein m'émeut
comme les dunes
sous la lune.
Et l'oiseau noir
qui vole autour
— est-ce l'amour...
 
 
Je tiens tes cheveux sous mes doigts
ton vrai parfum d'herbe en amour
— graminées presque mûres,
prairie en proie au levain des fleurs,
cette odeur de petite bête endormie —
dans mes mains.
 
 
Dehors sous la lune rose
la caille à gorge claire
la belle des blés
chante pour les nielles,
pour les asphodèles,
et pour je ne sais...
 
 
Je sais tout de l'amour
puisque j'en sais pleurer.
 
 
La nuit les roses ne vieillissent pas.
La nuit les roses se reposent d'aimer.
 
 
Te voici donc pommier de mai.
Rose au-dessus des ombres.
 
Et je suis vigne autour nouée
prête à mûrir comme un automne.
 
 
Il y a dans ton souffle
un papillon qui bat de l'aile
en frôlant les rideaux de la nuit.
 
C'est peut-être ma vie ou la tienne
que je poursuis avec mes lèvres
à cache-cache sur tes lèvres. 
 
 
Tu me livres tes mains,
tu m'offres ton sourire.
Tu promets une vie de bonheur.
 
Combien de temps suffira-t-il
à mon émoi
de serrer tes deux mains contre moi ?
 
Je n'ai pas assez d'un sourire,
pas assez d'une vie de bonheur.
 
Il me faut l'enfer et le ciel.
 
Et tout de suite.
 
 
Je m'appuie sur toi.
 
Je suis maître du monde.
La lumière est le sang de mes veines.
 
Je ne suis pas un autre que Dieu.
 
Dans mon corps sidéral se déroulent 
la gloire et la jubilation des astres.
 
Alléluia.
 
 
Alléluia !
Je t'invente la première femme
et je te sais pareille à moi.
 
Que cet amour maudit devienne
mon pain chaque jour
— mon soleil !
 
 
N'est-ce pas toi qu'entre mes bras
je serre ?
et que je tiens si fort en épouvante !
 
Mais tu n'as de visage ou de nom !
Mais tu n'existe pas.
 
Mais tu n'existes pas.
 
 
J'ai bu de l'eau.
 
Mais je n'ai bu ni source
ni fraîcheur.
 
 
Comme pour d'autres Hiroshima
mon amour est sur moi
la marque de la Bête.
 
 
La révolte royale 
de l'homme s'achève en une chute morne.
 
Heureusement tu es là
pour recevoir entre tes bras
ma défaillance.
 
Qui m'oserait damner en toi,
ma buveuse de lune ?
 
Laisse-moi maintenant m'endormir
les paumes sur tes seins ensommeillés.
 
(...)
 
Les mots sont des cordages
tendus sur des pistes sableuses.
 
Les mots sont le cri dans la gorge des fauves,
​​​​​​​et les mots sont l'odeur de la bête
chassée sur la piste crayeuse.
 
Les mots sont les chevaux de cirque
en rond chassés sur les tapis — en rond...
​​​​​​​
 
Viens sous la bâche verte
dans la ménagerie de nos désirs désabusés
qui dorment.
 
Nous tâcherons de les réveiller.
Et puis nous ouvrirons les cages.
 
(...)
 
(Sans date)
 
​​​​​​​Marcela Delpastre, Petits Motets d'Amour dans Poésie Modale I, Editions dau Chamin de sent jaume 2000
 
Image : Proverbes limousins et dessins de Marcelle Delpastre, Bibliothèque Francophone Multimédia
 
 
 
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