[107]
Je me remets à écouter du Bach —je me remets
À sentir la terre du jardin—
Je me remets à penser à des poèmes et à des romans — je me remets
Au silence qui fait d'un matin pluvieux
Le début du monde de demain —autour
De moi, il y a les spectres des garçons d'avant
Que je ne t'aie connu — leur époque est révolue,
Et, comme moi, ils sont loin du sommet
Où le soleil avait rendu glorieuses
Des têtes avec d'autres coupes de cheveux,
Des sexes compressés dans d'autres pantalons.
Tu <ris> de mon Bach et tu as des mots
<apitoyés> d'admiration pour ces frères à moi.
Ainsi apitoyé tu me quittes en riant.
[107]
Ritorno ad ascoltare Bach —Ritorno
ad odorare la terra del giardino—
ritorno a pensare poesie e romanzi—ritorno
al silenzio che fa di un piovoso mattino
l'inizio del mondo di domani — intorno
a me ci sono gli spettri dei ragazzi di prima
che ti conoscessi—è passato il loro giorno,
e, como me, sono lontani dalla cima
dove il sole aveva reso gloriose
teste con altro taglio di capelli,
grembi stretti in altri calzoni.
Tu <ridi> del mio Bach, ed hai <pietose>
parole d'ammirazione per quei miei fratelli.
Così pietoso ridendo mi abbandoni.
Pier Paolo Pasolini, L'Hobby del sonetto (le sonnet comme passe-temps) (1971-1972), première publication posthume, 2012. Sonnets traduit de l'italien par René de Ceccatty. Éditions Gallimard 2012
Photo : Pier Paolo Pasolini et Ninetto Davoli à qui les 112 sonnets sur le mode élisabéthains sont adressés.