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Nous ne voulons pas être tristes

Publié le par Fred Pougeard

Nous ne voulons pas être tristes
C'est trop facile
C'est trop bête
C'est trop commode
On en a trop souvent l'occasion
C'est pas malin
Tout le monde est triste
Nous ne voulons plus être tristes
 
Blaise Cendrars, Feuilles de route, Au sans Pareil 1924
 
Image : Henri Matisse, Le bonheur de vivre 1905-1906, Fondation Barnes, Philadelphie
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Ni renard, ni croûton, ni patates

Publié le par Fred Pougeard

Il n'est pas là le vieux soleil,
Aussi absent que quand on dort.
 
​​​​​​​Le champ a froid. Les feuilles sont sèches.
Mal est ultime en cette lumière.
 
Dans cet air morne les tiges brisées
Ont des bras sans mains. Ont des troncs
 
Sans jambes ou, pour cela, sans têtes.
Ont des têtes où un cri captif
 
Est le simple mouvement d'une langue.
La neige pétille comme une vision tombant
 
Du ciel, comme la vision de claires disparitions.
Les feuilles sautillent, griffent le sol.
 
C'est grand janvier. Le ciel est rude.
Les tiges dans la glace ont leurs fermes racines.
 
Là, dans cette solitude, une syllabe,
Hors de ces gauches palpitations,
 
Entonne son vide singulier,
Le rien le plus féroce des bruits d'hiver.
 
Là, dans ce mal, nous connaissons
Le bien dans la suprême pureté.
 
Le corbeau rouillé prend son vol
Son œil brille de méchanceté....
 
On vient le voir ici pour se distraire,
mais à distance, sur un autre arbre.
 
Wallace Stevens, Transport vers l'été. Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Alexandre Prieux. Editions Nous 2020.
 
 
 

 

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Retrouver mon visage

Publié le par Fred Pougeard

j'aimerais bien retrouver mon visage
il s'est perdu dans le malheur des foules
un soir que j'étais distrait comme un singe
égaré par les phases de la lune
 
un soir que je détroussais la momie
d'une amoureuse il y a cinq mille ans
un soir que j'étais infidèle et vil
et que je prétendais tuer le temps
 
qui me rendra seulement mon visage
et me dira que je suis pardonné
je ne connaîtrai jamais qui se venge
en me privant de ce qu'il m'a donné
 
Jean-Claude Pirotte Cette âme perdue, Le Castor Astral 2011
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Pas d'échéance

Publié le par Fred Pougeard

Pas d'échéance pour l'homme trempé dans la parole
Car la vie roule et hurle
Plus folle que l'étreinte de la mort
Plus fiévreuse que les cils du soleil
Elle peut venir demain sursauter dans ma case
Chasser la peine plaquée sur ma peau
Illuminer ma cabane naufragée
Et me faire oublier mon berceau de pluie
Et toutes les rives ruisselantes de mes nuits
Et tout l'espace catarrheux des regards
Mais la terre, la terre, la terre que j'ai labourée hier
La terre qui me colle encore au visage
Ce sol par moi remué
​​​​​​​Est parti avec la dernière averse
Emportant chants et semailles à la mer
Et sous mes pieds une chenille n'accepterait pas de vivre
Les dents de la campagne ont rogné ma patience
Et mon souffle est fragile comme une fleur
 
Jean Métellus, Au piripite chantant, Les lettres nouvelles/Maurice Nadeau 1978
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