Top articles
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Le malheur doit être transformé en quelque chose d'autre...
Quand on a souffert quelque chose, quand on a senti quelque chose, chez un homme de lettres, cela demande une forme (...) Un écrivain, un poète sait que tout ce qu'il vit est fait pour écrire. Je crois que dans l'Odyssée, on lit que les dieux donnent...
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Kami Hikôki/L'avion en papier
Il suffit de quelques mots si peu satisfaisants soient-ils, venus de rien et qui prennent forme comme des composés chimiques pour que je retrouve mon calme Mais parfois je pense que dire ces choses-là maintenant n'avance à rien Parfois je me demande même...
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Mers noires
I Nous voici les darses d'un port abandonné où l'on ne charge plus ni vivres ni épices Où ne carène aucun hornier, où aucune vergue ne repose les mouettes Auprès d'une mer inutile, Poétesse de personne. III Le jour pèse aux navires à quai, car ils aimaient...
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Après Ikkyu (extraits)
18 Mon zabuton est aussi le lit de ma chienne. Rose y dort, mu jusqu'au bout des poils. Je l'ai aperçue au clair de lune ; mince silhouette blanche lovée sur le coussin vert, frémissant de rêves de caille. Elle me repère, ouvre un œ il, bouge la queue....
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Dernier fragment
Et as-tu reçu ce que tu voulais de cette vie, malgré cela ? Oui. Et que voulais-tu ? Me dire bien-aimé, me sentir bien aimé sur la Terre. Raymond Carver, A New path to the waterfall (1989), Jusqu'à la cascade dans Poésie, traduit de l'anglais par Jacqueline...
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Lettre à Curzio Malaparte
(...) Il fallait donc que je monte, un jour, avant la paresse de l'âge, les douleurs, le souffle court, à ce Spazzavento -où le vent balayeur de nuages est la seule musique qui accompagne ton silence, comme la houle océane en d'autre promontoire le fait...
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Prière
Donne-moi une fontaine proche de la forêt Peu profonde de quoi remplir le creux de la main Et une grenouille qui gardera l'eau pure Je viendrai à l'automne repêcher les feuilles mortes Je viendrai en hiver et briserai la glace Et en août j'inviterai à...
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Pluie d'été
Il pleut sur Malmousque Sur le Château d'If, sur les îles, entre les maisons dans les calanques, et sur les costumes de bain qui devaient sécher au balcon à côté des géraniums. Il pleut sur Malmousque ; ça a commencé avant l'aube : ce crépitement que...
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Le lever des amants
Les draps d'abord rejetés maintenant ramenés par dessus les montagnes cutanées et la forêt des têtes sont des manteaux de tragédiens à l'instant où se couche le soleil et où les tragédiens couvrent leur face opposant à la lumière pourprée le blanc laiteux...
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Une lettre de Descartes sur "la verdeur d'un bois, les couleurs d'une fleur, le vol d'un oiseau".
Dans une lettre à la reine Elisabeth*, Descartes estime "qu'il faut entièrement se délivrer l'esprit de toutes sortes de pensées tristes, et même aussi de toutes sortes de méditations sérieuses touchant les sciences, et ne s'occuper à imiter que ceux...
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Marguerites/Daisies
Vas-y : dis ce que tu penses. Le jardin n'est pas le monde réel. Les machines sont le monde réel. Dis honnêtement ce que n'importe quel idiot pourrait lire sur ton visage : nous éviter, résister à la nostalgie a du sens. Ce n'est pas assez moderne, le...
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Agir, je viens
Poussant la porte en toi, je suis entré Agir, je viens Je suis là Je te soutiens Tu n'es plus à l'abandon Tu n'es plus en difficulté Ficelles déliées, tes difficultés tombent Le cauchemar d'où tu revins hagarde n'est plus Je t'épaule Tu poses avec moi...
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Et puis arrive le temps des regrets...
Et puis arrive le temps des regrets. Dans la demi-lumière des réverbères, dans la pénombre des illuminations nous ne reconnaissons plus nos maîtres. Une ombre s’avance entre nous, vit, palpite, nous repousse et victorieuse un instant rassemble ses courtisans....
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Nuit qui déborde du corps
Jasmin sur les nuits de juillet. Chanson Pour deux étrangers qui se rencontrent sur une rue qui ne mène nulle part Qui suis-je après ces deux yeux en amande ? Dit l'étranger Qui suis-je après ton exil en moi ? Dit l'étrangère Prenons garde alors, à ne...
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Le châtreur
Lorsque d'étable en étable roule le châtreur pour choisir les taureaux à châtrer, pas besoin de leur toucher les boules, dans les yeux suffit de les fixer : si l'un a le regard doux et cordial, il est fichu, le châtreur écrabouille avec sa pince les couilles,...
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Au jour
Un grand plateau de mer de collines de vapeur Se déroule à l'épaisse embrasure des bleus Du haut : telle une idée de Chine intérieure Se déroule une paix de soie et des villages De zéphyr et parfois parmi le cours des âges Ici et là un manteau d'ombres...
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Lettre au général X
Je viens de faire quelques vols sur P. 38. C’est une belle machine. J’aurais été heureux de disposer de ce cadeau-là pour mes vingt ans. Je constate avec mélancolie qu’aujourd’hui, à quarante trois ans, après quelques six mille cinq cents heures de vol...
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Les Pâques à New-York
Flecte ramos, arbor alta, tensa laxa viscera Et rigor lentescat ille quem dedit nativitas Ut superni membra Regis miti tendas stipite... FORTUNAT Pange lingua Fléchis tes branches, arbre géant, relâche un peu la tension des viscères, Et que ta rigueur...
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Leçon de poésie niveau IV
Laisse les étoiles tranquilles leur cadastre est déjà impeccable Laisse le c œur dans la poitrine tu n'es pas médecin Laisse la nuit aux veilleurs et la nature aux espèces disparues Laisse ton être et ton âme picoler dans un coin Laisse la vie devenir...
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Ce poème sans nom...
Il faudrait trouver un nom à ce poème sans nom de la fabulosité ou merveillosité universelle, dont les origines remontent à l'apparition de l'homme sur la terre et dont les versions, multipliées à l'infini, sont l'expression de l'imagination poétique...
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Lai des roseaux rompus
Le vent des monts Torwana a des genoux de mousse porte un enfant qui dort appelle les étoiles avec la voix des océans face au blanc fossile du jour Le vent des monts Torwana sans rivages sans horizon sans saisons a le visage de tout le monde a l'aloès...
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Bilan
Nous conservons nos doigts non pour les choses ordinaires mais pour compter nos amis qui tombent les heures d'attente les dettes nos rêves évanescents les années qui nous tractent vers la fin mais aussi toutes les fois où nous échouons à être des assassins...
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De la dignité d'une vie
Il ne reste qu'une seule clé de la dignité d'une vie, il faut enchaîner celle qui ouvre la dernière chambre à la poche du pantalon. Mon père oublie de remonter le bracelet-montre, les aiguilles indiquent l'éternel et le toujours. Imperceptiblement les...
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Brûle
Brûle tout ce que tu peux : les lettres d’amour les notes de téléphone la liste des vêtements sales les actes et les certificats les confidences des collègues irrités la confession interrompue le poème érotique qui ratifie l’impuissance et annonce l’artériosclérose...
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À cette hauteur où le vent souffle toujours froid...
À cette hauteur où le vent souffle toujours froid, où le mystère devient presque palpable, d’une proximité, d’une densité troublantes, j’aimerais pouvoir rejoindre en toi l’étincelle qui est au centre de l’âme, ce sens intérieur qui dépasse ta simple...